VAGUE DE PAPIER SUR LES CORRESPONDANCES ÉLECTRIQUES



Tout a une faim. Et j'ai une bonne demi-douzaine de chiens aboyant-famine aux crocs longuement plantés dans mes mollets. Je suis en colère. Contre moi-même. Je passe mes jours dans la jungle électrique à retourner ma tête dans tous les sens ; le mot de torticolis n'ayant plus le moindre sens pour un cortex défaisant sans trêve la nasse grise de ses méandres. Je vais rentrer sous ma tente. Et peu importe que j'y découvre un désert plutôt que des tentures achéennes et des coussins moelleux… Il n'y a plus de secret. Je dois retourner mes miroirs et entrer méthodiquement dans la nuit. Depuis quelques mois déjà, les espions de La Société Universelle de la Fiction enquêtent sur mon sujet. Leurs rondes silencieuses ont porté leurs pas jusque dans mes rêves sourcilleux, et je crois entendre des murmures et des sons électriques de l'autre côté du mur. Je crois qu'ils se penchent désormais sur mon épaule, comme des anges déchus ou des fantômes. Et ce n'est rien de dire que le sang frais de ce lieu se voit menacé d'ores et déjà d'un crime microbiologique… Le jour précis de son premier anniversaire, le blog du correspondancier est donc menacé —tel un récif corallien près les côtes australiennes— par un immodéré et immérité retour à la fiction, au papier, aux savanes d'encres, aux savantes ratures et aux mille et uns cafés. Il y a désormais un grand péril de déperdition uni-globale de diversité biologique en germe parmi ces lignes, et mes stocks de résistance diminuent à vue d'œil comme ce silence grandit. Nul ne peut dire si quelque prurit électronique fils de l'addiction et de la désinvolture ne me forceront pas la main dans le sens d'épisodiques retours ? Comment savoir. Le pire n'est pas toujours sûr. Néanmoins, ma voix ne sera longue que dans le désert blanc, et je ne peux laisser pour l'instant qu'un souci d'explorateur à mes fidèles lecteurs. Acceptez donc parmi mes remerciements sincères, cet indéfinitif claquement de porte, et les modestes clics spatio-temporels qui vont avec. À bientôt donc, ici ou là…


vendredi 19 septembre 2008

CE MORS QUE LA MORT MORD

¶— Martin Heidegger : « Dès qu'un homme est né, il est capable de mourir.»

¶— Auguste Comte : « La société est faite de plus de morts que de vivants.»

¶— Jules Michelet : « J'ai trop bu le sang des morts.»

¶— Friedrich Nietzsche in Le Crépuscule des idoles : « Socrate n'est pas un médecin, se dit-il tout bas : la mort seule est ici médecin… Socrate seulement fut longtemps malade…»

¶— Isaac Newton — ou Nicolas de Cuse — : « Nous sommes des nains juchés sur des épaules de géants, et dans cette position voyant plus loin qu'eux-mêmes.»

¶— Jorge Luis Borges in Deutsches Requiem : « Il est naturel que je pense à mes aînés, puisque je suis près de leur ombre, puisque en quelque sorte je suis eux.»

¶— Cyrano de Bergerac, citation in Le Petit Robert (© 1976) : « Ma langue est une vipère qui porte le venin et la thériaque tout ensemble.»