VAGUE DE PAPIER SUR LES CORRESPONDANCES ÉLECTRIQUES



Tout a une faim. Et j'ai une bonne demi-douzaine de chiens aboyant-famine aux crocs longuement plantés dans mes mollets. Je suis en colère. Contre moi-même. Je passe mes jours dans la jungle électrique à retourner ma tête dans tous les sens ; le mot de torticolis n'ayant plus le moindre sens pour un cortex défaisant sans trêve la nasse grise de ses méandres. Je vais rentrer sous ma tente. Et peu importe que j'y découvre un désert plutôt que des tentures achéennes et des coussins moelleux… Il n'y a plus de secret. Je dois retourner mes miroirs et entrer méthodiquement dans la nuit. Depuis quelques mois déjà, les espions de La Société Universelle de la Fiction enquêtent sur mon sujet. Leurs rondes silencieuses ont porté leurs pas jusque dans mes rêves sourcilleux, et je crois entendre des murmures et des sons électriques de l'autre côté du mur. Je crois qu'ils se penchent désormais sur mon épaule, comme des anges déchus ou des fantômes. Et ce n'est rien de dire que le sang frais de ce lieu se voit menacé d'ores et déjà d'un crime microbiologique… Le jour précis de son premier anniversaire, le blog du correspondancier est donc menacé —tel un récif corallien près les côtes australiennes— par un immodéré et immérité retour à la fiction, au papier, aux savanes d'encres, aux savantes ratures et aux mille et uns cafés. Il y a désormais un grand péril de déperdition uni-globale de diversité biologique en germe parmi ces lignes, et mes stocks de résistance diminuent à vue d'œil comme ce silence grandit. Nul ne peut dire si quelque prurit électronique fils de l'addiction et de la désinvolture ne me forceront pas la main dans le sens d'épisodiques retours ? Comment savoir. Le pire n'est pas toujours sûr. Néanmoins, ma voix ne sera longue que dans le désert blanc, et je ne peux laisser pour l'instant qu'un souci d'explorateur à mes fidèles lecteurs. Acceptez donc parmi mes remerciements sincères, cet indéfinitif claquement de porte, et les modestes clics spatio-temporels qui vont avec. À bientôt donc, ici ou là…


mardi 14 octobre 2008

ÉTYMOLOGIE DU KANGOUROU

Le bonheur n'existe pas tout le monde sait ça c'est dire que la mer est bleue que le jour naît de la nuit et que les fascistes ont brûlé des livres en tant que chose préhensible, il n'existe pas il n'est que cendres, sables noirs sur la plage de Stromboli. Une description du bonheur c'est la transcription de la brièveté du bonheur : à la fois long et court, comme le saut d'un cheval au-dessus un abîme. Il y a un temps pour aimer et un temps pour mourir, on voit toujours mourir ce que l'on aime, le temps fait mourir l'amour en soi et même si l'on s'élève dans des ballons au propane, les choses et les gens filent comme des trains dans la neige. Si le bonheur va de temps en temps, d'espace en espace entre le même et l'autre et c'est parce qu'il nous semble dû, parce que quelqu'un l'attend, qu'il est persuadé qu'il arrive, qu'il vole vers lui. Il y a un voyage, et donc un travail, un travers, un travel amoureux de l'histoire & de la géographie qui force dans la roche du réel pour nous fournir la certitude qu'il dure. Il n'y a pas de forme absolue du bonheur. Il n'y a pas de sac, il n'y a pas de mode, pas de définition, il n'y a pas de matrice ni de concours Lépine du bonheur. C'est un acteur anarchiste, un poseur de bombe, un fedayin dans les dunes. C'est une citation. Le bonheur est une citation, un court passage du texte, un itinéraire brisé. Le bonheur est une méthode peu sûre pour échelonner sa vie, ce n'est pas une méthode. Un oiseau vient de se poser sur le rebord de mon balcon. Le bonheur est chaud et froid en même temps, il sourd et disparaît au même instant c'est, exsangue et vif, une boule de neige entre les mains, pressée. Mais il y a, c'est vrai, un certain bonheur à brièvement décrire, la brièveté du bonheur. On aime le chaos ou l'on aime pas.