VAGUE DE PAPIER SUR LES CORRESPONDANCES ÉLECTRIQUES



Tout a une faim. Et j'ai une bonne demi-douzaine de chiens aboyant-famine aux crocs longuement plantés dans mes mollets. Je suis en colère. Contre moi-même. Je passe mes jours dans la jungle électrique à retourner ma tête dans tous les sens ; le mot de torticolis n'ayant plus le moindre sens pour un cortex défaisant sans trêve la nasse grise de ses méandres. Je vais rentrer sous ma tente. Et peu importe que j'y découvre un désert plutôt que des tentures achéennes et des coussins moelleux… Il n'y a plus de secret. Je dois retourner mes miroirs et entrer méthodiquement dans la nuit. Depuis quelques mois déjà, les espions de La Société Universelle de la Fiction enquêtent sur mon sujet. Leurs rondes silencieuses ont porté leurs pas jusque dans mes rêves sourcilleux, et je crois entendre des murmures et des sons électriques de l'autre côté du mur. Je crois qu'ils se penchent désormais sur mon épaule, comme des anges déchus ou des fantômes. Et ce n'est rien de dire que le sang frais de ce lieu se voit menacé d'ores et déjà d'un crime microbiologique… Le jour précis de son premier anniversaire, le blog du correspondancier est donc menacé —tel un récif corallien près les côtes australiennes— par un immodéré et immérité retour à la fiction, au papier, aux savanes d'encres, aux savantes ratures et aux mille et uns cafés. Il y a désormais un grand péril de déperdition uni-globale de diversité biologique en germe parmi ces lignes, et mes stocks de résistance diminuent à vue d'œil comme ce silence grandit. Nul ne peut dire si quelque prurit électronique fils de l'addiction et de la désinvolture ne me forceront pas la main dans le sens d'épisodiques retours ? Comment savoir. Le pire n'est pas toujours sûr. Néanmoins, ma voix ne sera longue que dans le désert blanc, et je ne peux laisser pour l'instant qu'un souci d'explorateur à mes fidèles lecteurs. Acceptez donc parmi mes remerciements sincères, cet indéfinitif claquement de porte, et les modestes clics spatio-temporels qui vont avec. À bientôt donc, ici ou là…


vendredi 20 mars 2009

SAKURA I & II

1/ Hier encore, j’étais la blessure, le cadavre hurlant et le sang gisant sur la feuille,
Aujourd’hui, je suis le couteau, la plume assassine, la toxine dans le mot…
Au temps où l’amour était corps et esprit, dans sa réalité fabuleuse et obscure,
Nous vivions avec l’ardeur désespérée dans le bouillonnement chaotique…
…. et la sensation à l’état pur.
Mais déjà, cette foi dans le poison et dans le creux qui nous vidait,
Comme une fatigue dans l’âme et le corps qui va puiser dans l’entonnoir,
Faisait surgir un Enfer profond de cette démence que l’on nomme la vie !


2/Je n'ai pas vu de sang couler. Je me suis privé d'une partie de moi-même dans une douleur sous-tendue par l'absence du monde. Pas de traces. Pas de cicatrices. L'âme est intacte. Ces vols de vautours tenaces ni ces flux de rats dans les escaliers n'y changeront rien. Cette viande amuie, cette chair sèche, ce tas de boue et de chyme mélangées ne peut laisser qu'un goût de cendre dans la plus macabre des gueules tendues. Je dédie cet échec silencieux à mes morts. À tous ceux qui se tournent et se retournent en moi comme des alligators dans la vase. Je remercie Dieu ! sa cohorte d'anges et de vermines de m'avoir si souvent épargné de leur présence bienfaitrice et je leur crache au ciel. Je lècherai les orteils du diable jusqu'à l'os. Je mangerai ma femme et mes enfants jusqu'à la fin des temps. J'offrirai mon ventre et mon bas-ventre, mes humeurs mes excréments et tout ce qui pense en moi en un vif holocauste au royaume des Enfers. Non ! je n'écrirais pas ce livre.