VAGUE DE PAPIER SUR LES CORRESPONDANCES ÉLECTRIQUES
Tout a une faim. Et j'ai une bonne demi-douzaine de chiens aboyant-famine aux crocs longuement plantés dans mes mollets. Je suis en colère. Contre moi-même. Je passe mes jours dans la jungle électrique à retourner ma tête dans tous les sens ; le mot de torticolis n'ayant plus le moindre sens pour un cortex défaisant sans trêve la nasse grise de ses méandres. Je vais rentrer sous ma tente. Et peu importe que j'y découvre un désert plutôt que des tentures achéennes et des coussins moelleux… Il n'y a plus de secret. Je dois retourner mes miroirs et entrer méthodiquement dans la nuit. Depuis quelques mois déjà, les espions de La Société Universelle de la Fiction enquêtent sur mon sujet. Leurs rondes silencieuses ont porté leurs pas jusque dans mes rêves sourcilleux, et je crois entendre des murmures et des sons électriques de l'autre côté du mur. Je crois qu'ils se penchent désormais sur mon épaule, comme des anges déchus ou des fantômes. Et ce n'est rien de dire que le sang frais de ce lieu se voit menacé d'ores et déjà d'un crime microbiologique… Le jour précis de son premier anniversaire, le blog du correspondancier est donc menacé —tel un récif corallien près les côtes australiennes— par un immodéré et immérité retour à la fiction, au papier, aux savanes d'encres, aux savantes ratures et aux mille et uns cafés. Il y a désormais un grand péril de déperdition uni-globale de diversité biologique en germe parmi ces lignes, et mes stocks de résistance diminuent à vue d'œil comme ce silence grandit. Nul ne peut dire si quelque prurit électronique fils de l'addiction et de la désinvolture ne me forceront pas la main dans le sens d'épisodiques retours ? Comment savoir. Le pire n'est pas toujours sûr. Néanmoins, ma voix ne sera longue que dans le désert blanc, et je ne peux laisser pour l'instant qu'un souci d'explorateur à mes fidèles lecteurs. Acceptez donc parmi mes remerciements sincères, cet indéfinitif claquement de porte, et les modestes clics spatio-temporels qui vont avec. À bientôt donc, ici ou là…
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mardi 11 novembre 2008
PHASES
Je voudrais juste que ça continue comme ça, tout droit, à cheval sur la flèche du temps. Je voudrais des phrases justes, qui durent dans leur objectif propre comme dans une bulle allongée. Qu'elles quittent sans cesse leur orbite, leurs rails, leur aire fauve et qu'elles arrêtent de tourner sur elles-mêmes comme des chiens avant de se coucher — nez dans leur cul. Je voudrais des phrases qui avancent debout. Des phrases qui décollent de la boue à leurs semelles. Des phrases qui marchent comme la vie marche dans la tête. Je voudrais ne pouvoir écrire que des attaques de phrase, des débuts sans but, des têtes de pont et des têtes de phrases. Je voudrais juste des phrases en phase avec l'air ambiant. Des phrases à bouche de lion qui n'auraient pas besoin d'ailes. Des phrases avalant l'air comme les locomotives. Des locophrases. Des phrases avides de mouvement et dont le seul carburant serait cette avidité même. Des phrases omnivores. Des omniphrases. Des phrases n'ayant plus le sentiment d'être un peu juste, d'être gênées aux entournures. Des phrases qui se moqueraient de la phrase d'avant et de la phase d'après, qui se foutraient de leur tournure comme de vraies pommes du verger. Des phrases impuissantes. Des phrases n'ayant barre sur rien. Des phrases sans barre, sans voile, sans moteur ni canot de sauvetage. Des presque sans pilote. Des phrases qui seraient presque des phrases. Des fresques sans mur. Des phresques ?