VAGUE DE PAPIER SUR LES CORRESPONDANCES ÉLECTRIQUES



Tout a une faim. Et j'ai une bonne demi-douzaine de chiens aboyant-famine aux crocs longuement plantés dans mes mollets. Je suis en colère. Contre moi-même. Je passe mes jours dans la jungle électrique à retourner ma tête dans tous les sens ; le mot de torticolis n'ayant plus le moindre sens pour un cortex défaisant sans trêve la nasse grise de ses méandres. Je vais rentrer sous ma tente. Et peu importe que j'y découvre un désert plutôt que des tentures achéennes et des coussins moelleux… Il n'y a plus de secret. Je dois retourner mes miroirs et entrer méthodiquement dans la nuit. Depuis quelques mois déjà, les espions de La Société Universelle de la Fiction enquêtent sur mon sujet. Leurs rondes silencieuses ont porté leurs pas jusque dans mes rêves sourcilleux, et je crois entendre des murmures et des sons électriques de l'autre côté du mur. Je crois qu'ils se penchent désormais sur mon épaule, comme des anges déchus ou des fantômes. Et ce n'est rien de dire que le sang frais de ce lieu se voit menacé d'ores et déjà d'un crime microbiologique… Le jour précis de son premier anniversaire, le blog du correspondancier est donc menacé —tel un récif corallien près les côtes australiennes— par un immodéré et immérité retour à la fiction, au papier, aux savanes d'encres, aux savantes ratures et aux mille et uns cafés. Il y a désormais un grand péril de déperdition uni-globale de diversité biologique en germe parmi ces lignes, et mes stocks de résistance diminuent à vue d'œil comme ce silence grandit. Nul ne peut dire si quelque prurit électronique fils de l'addiction et de la désinvolture ne me forceront pas la main dans le sens d'épisodiques retours ? Comment savoir. Le pire n'est pas toujours sûr. Néanmoins, ma voix ne sera longue que dans le désert blanc, et je ne peux laisser pour l'instant qu'un souci d'explorateur à mes fidèles lecteurs. Acceptez donc parmi mes remerciements sincères, cet indéfinitif claquement de porte, et les modestes clics spatio-temporels qui vont avec. À bientôt donc, ici ou là…


lundi 12 janvier 2009

PRIX SOLDÉS SUR LA LUTTE DES CLASSES



Cabinet de kinésithérapie, Av. X. Au guichet, une patiente (qui prend tout son temps pour sortir et ranger ses petites affaires) souhaite une bonne journée à la secrétaire médicale. — À vous zaussi, répond cette dernière ! Et bon courage pour les Soldes ! C'est donc une habituée. — Ah non, dit la dame derrière laquelle je m'impatiente : Pour nous c'est déjà quasi fini les Soldes ! Vous savez dans le luxe, c'est pas pareil ! — Ah, dit la secrétaire ! — Oui on fait des pré-ventes vous savez ? — Non dit la secrétaire ! — Si par internet, dit la dame. On a contacté nos meilleures clientes par mail, et on a fait trois jours de soldes avant la date ! des soirées privilèges ça s'appelle ! et alors on a déjà vendu toutes nos soldes ! Enfin, le chiffre est fait à 70 % ! le reste, maintenant, c'est de la rigolade. Vous savez, dans le luxe, c'est pas pareil. — Oui je sais, dit la secrétaire. — L'autre soir, reprend la dame, j'ai eu une cliente qui m'a fait mon chiffre pour la semaine. Une seule cliente. Voyez ? — Ah oui, dit la secrétaire, qui ne m'a toujours pas vu dans le couloir, en train de faire hypocritement semblant de regarder de médiocres photos artistiquement encadrées et en train de penser combien, moi aussi, j'en suis du reste. — Au revoir, à mercredi dit la dame ! — Au revoir madame ! — Oui ! monsieur ! c'est pour quoi ? enchaîne la secrétaire comme si de rien n'était. Et cetera.