VAGUE DE PAPIER SUR LES CORRESPONDANCES ÉLECTRIQUES



Tout a une faim. Et j'ai une bonne demi-douzaine de chiens aboyant-famine aux crocs longuement plantés dans mes mollets. Je suis en colère. Contre moi-même. Je passe mes jours dans la jungle électrique à retourner ma tête dans tous les sens ; le mot de torticolis n'ayant plus le moindre sens pour un cortex défaisant sans trêve la nasse grise de ses méandres. Je vais rentrer sous ma tente. Et peu importe que j'y découvre un désert plutôt que des tentures achéennes et des coussins moelleux… Il n'y a plus de secret. Je dois retourner mes miroirs et entrer méthodiquement dans la nuit. Depuis quelques mois déjà, les espions de La Société Universelle de la Fiction enquêtent sur mon sujet. Leurs rondes silencieuses ont porté leurs pas jusque dans mes rêves sourcilleux, et je crois entendre des murmures et des sons électriques de l'autre côté du mur. Je crois qu'ils se penchent désormais sur mon épaule, comme des anges déchus ou des fantômes. Et ce n'est rien de dire que le sang frais de ce lieu se voit menacé d'ores et déjà d'un crime microbiologique… Le jour précis de son premier anniversaire, le blog du correspondancier est donc menacé —tel un récif corallien près les côtes australiennes— par un immodéré et immérité retour à la fiction, au papier, aux savanes d'encres, aux savantes ratures et aux mille et uns cafés. Il y a désormais un grand péril de déperdition uni-globale de diversité biologique en germe parmi ces lignes, et mes stocks de résistance diminuent à vue d'œil comme ce silence grandit. Nul ne peut dire si quelque prurit électronique fils de l'addiction et de la désinvolture ne me forceront pas la main dans le sens d'épisodiques retours ? Comment savoir. Le pire n'est pas toujours sûr. Néanmoins, ma voix ne sera longue que dans le désert blanc, et je ne peux laisser pour l'instant qu'un souci d'explorateur à mes fidèles lecteurs. Acceptez donc parmi mes remerciements sincères, cet indéfinitif claquement de porte, et les modestes clics spatio-temporels qui vont avec. À bientôt donc, ici ou là…


jeudi 14 août 2008

DÉBAT DE FOURMIS

Rien de plus facile à prouver que, à écrire, la deuxième phrase soit plus aisée que la première, disait Luigi Éden-Théa.

S'échinant au jour le jour au ras du sol, c'est peut-être là ce qu'elles finissent par penser, les fourmis, à force de coulisser sur la terre meuble sans savoir ce que, au juste, elles font ? Assujetties à porter leur monde sur leurs épaules comme, à ne pouvoir laisser guère plus que quelques petits traits horizontaux elles avancent, zigzaguent, puis reviennent sur leurs pas en effaçant leurs propres traces. Leur corps étroit en forme de minuscule encrier, s'échinent-elles ainsi sans se soucier d'hier ni de demain ; fortes et faibles à la fois…

Il est vrai que, de sources sûres et selon l'antépénultième des prophètes livresques, nous avons tous tendance à tenir pour sûr que : Les premiers seront les derniers ! disait-il.

Je me suis penché sur ton épaule et j'ai pensé à un débat de fourmis, me dit-il ! Mais les fourmis n'ont pas d'épaules, et elles ne savent pas lire non plus.