J'ai un peu réfléchi à cette histoire disait Luigi Éden-Théa, et c'est vrai que j'ai pensé à Burton, et à ses digressions sur l'air… À ce balancement permanent et non moins paradoxal entre ce dont on se souvient et ce que l'on veut dire. On pense bien sûr à Montaigne, à ses totems grecs et latins mais, personnellement, le livre de Burton me fait systématiquement songé à Borges. L'œuvre de Borges est une entreprise serrée de remémoration globale — c'est ce qui se cache au fond de l'Aleph, du Livre de Sable, etc. — sauf que, chez lui, ce sont les événements de la vie qui sont comme des signets instillés dans les pages de ses lectures, et non l'inverse.
Ce que je veux dire c'est que, au final, il en va peut-être de l'écriture des blogs comme de celle des textes, disait-il. Tout simplement. Et que, comme disait l'autre, les livres et leur rédaction diffèrent suivant leurs penseurs : l'un réunit immédiatement dans son ouvrage toutes les clartés qu'il a su dérober à l'éclat d'une connaissance soudaine ; l'autre ne donne que les ombres, les copies en gris et en noir de ce qui s'est édifié la veille dans son âme.
VAGUE DE PAPIER SUR LES CORRESPONDANCES ÉLECTRIQUES
Tout a une faim. Et j'ai une bonne demi-douzaine de chiens aboyant-famine aux crocs longuement plantés dans mes mollets. Je suis en colère. Contre moi-même. Je passe mes jours dans la jungle électrique à retourner ma tête dans tous les sens ; le mot de torticolis n'ayant plus le moindre sens pour un cortex défaisant sans trêve la nasse grise de ses méandres. Je vais rentrer sous ma tente. Et peu importe que j'y découvre un désert plutôt que des tentures achéennes et des coussins moelleux… Il n'y a plus de secret. Je dois retourner mes miroirs et entrer méthodiquement dans la nuit. Depuis quelques mois déjà, les espions de La Société Universelle de la Fiction enquêtent sur mon sujet. Leurs rondes silencieuses ont porté leurs pas jusque dans mes rêves sourcilleux, et je crois entendre des murmures et des sons électriques de l'autre côté du mur. Je crois qu'ils se penchent désormais sur mon épaule, comme des anges déchus ou des fantômes. Et ce n'est rien de dire que le sang frais de ce lieu se voit menacé d'ores et déjà d'un crime microbiologique… Le jour précis de son premier anniversaire, le blog du correspondancier est donc menacé —tel un récif corallien près les côtes australiennes— par un immodéré et immérité retour à la fiction, au papier, aux savanes d'encres, aux savantes ratures et aux mille et uns cafés. Il y a désormais un grand péril de déperdition uni-globale de diversité biologique en germe parmi ces lignes, et mes stocks de résistance diminuent à vue d'œil comme ce silence grandit. Nul ne peut dire si quelque prurit électronique fils de l'addiction et de la désinvolture ne me forceront pas la main dans le sens d'épisodiques retours ? Comment savoir. Le pire n'est pas toujours sûr. Néanmoins, ma voix ne sera longue que dans le désert blanc, et je ne peux laisser pour l'instant qu'un souci d'explorateur à mes fidèles lecteurs. Acceptez donc parmi mes remerciements sincères, cet indéfinitif claquement de porte, et les modestes clics spatio-temporels qui vont avec. À bientôt donc, ici ou là…
ENVELOPPES
- À L'Établi
- Action30
- Autobus vide
- Borges
- Burton
- Calme de blanche
- Ceci n'est pas un rêve
- Choses qui sont presque
- Comme
- Con-concaténations
- Correspondances
- Cronopio de mejor fama
- Cuentos
- Dialogues de muets
- Dimanche
- Dimanches
- Enfants
- Epokhê
- Gentils Organisateurs
- Georges Poulet
- Haïkon
- Imitations Rastaquouères
- James Joyce
- L'inculte
- La reproduction photographique
- Luigi Éden-Théa
- Luigi-Éden-Théa
- Mirlitonnade
- Miroir de poche
- Morphocartographie
- Polaroïds
- Prières
- Rapines
- Réalisme
- Rien à dire
- Trouvailles réalistes
- Une Phase
- Varia
- Vivants Piliers